30 Mai 1991 :

De nombreux grains avec de la pluie nous ont accompagné une partie de la nuit. Vers 4h, nous larguons le ris le vent faiblissant à 10/15n de secteur W-SW.       Progressivement, le cap devient meilleur et nous fait gagner de l' Ouest.       Une grosse dépression est sur l'Atlantique Nord. Espérons qu'après son passage, les alizés vont remonter.       Damien et Aurélie assurent la veille pendant notre sieste en début d'après-midi.       Les enfants vivent heureux sans se poser de questions si ce n'est la composition du prochain repas. Quant aux parents, c'est plutôt le vague à l'âme surtout dû à l'état du capitaine. Qu' a-t-il ?       Point : 28°10 N et 38°15 W parcouru 110 milles au loch.

31 Mai 1991 :
      Mauvaise journée.
      Une nouvelle fois, la dérive ne veut plus remonter.
      Nous nous mettons à la cape puis démontons les trappes de visite du puits de dérive. Celle-ci semble tordue au niveau du fond du bateau.
      Attaché à une amarre, je plonge sous la coque et constate que la dérive s'est vrillée à partir d'une déchirure. On ne peut rien faire. Il faut attendre d'être au port pour essayer de l'enlever en grutant le bateau à moins qu'elle se coupe complètement en mer.
      Nous renvoyons la grand-voile et le génois car le vent est faible de secteur W-SW et même de S-SW à partir du milieu d'après-midi..
      L'après-midi, tout le monde se lave à l'eau de mer dans le cockpit.
      Nous avons mangé le pâté en croûte. Quel délice!
      Point : 28°31 N et 39°35 W parcouru 86 milles au loch.

1er juin 1991 :
      Mon dernier quart a été dur. Aussi, dès qu'Aurélie a été réveillé (6h15), elle m'a relayée. “Brave Drôlesse.”
      Une nouvelle fois, nous avons avancé d'une heure les montres. J'ai hâte de pouvoir prendre une douche d'eau douce. Tout colle dans le bateau.
      Le reste de la journée a été consacré au repos. Il fait très chaud.
      Point : 29°10 N et 40°40 W parcouru 77 milles au loch.

2 juin 1991 :
      Le vent est toujours aussi faible. C'est désespérant. Heureusement nous avons toujours un courant favorable.
      Nous avons ouvert un bocal de daube pour le repas de midi. Avec des spaghettis, quel régal! Le soir, nous mangeons les dernières oranges.
      Dans la soirée, Brigitte a craqué. J'ai essayé de lui remonter le moral en me convaincant moi-même. Ces vents faibles depuis une semaine nous minent sans parler du problème dérive.
      En effet, le bout de relevage s'est coupé; est-ce que le bas de la dérive est parti ?
      Point : 29°07 N et 41°49 W parcouru 72 milles au loch.

3 juin 1991 :
      Le vent, toujours très faible, a viré doucement au SE. Il fait très chaud.
      Damien a moulu un demi paquet de farine; je fais une tournée de pain et de pancakes.
      Nous mangeons nos dernières patates; il ne reste plus que trois oignons.

A l'étrave trois poissons-pilotes, Aurélie leur chante une chanson.

      Le soir, nous faisons tourner le moteur pendant une heure et demie. Depuis, nous n'entendons plus battre le reste de la dérive. Elle doit être par 5000 mètres de fond.
      Point : 29°01 N et 42°40 W parcouru 64 milles au loch.

4 juin 1991 :
      Brigitte m'a réveillé en sursaut vers 7h. : cargo sur notre arrière.
      Après contact avec la vhf portable, il devrait envoyer un télégramme à la famille Charles.
      Aurélie prend le quart pendant que nous dormons deux heures après le petit déjeuner.
      Enfin le vent revient doucement améliorant notre navigation.
      Point : 29°29 N et 44°02 W parcouru 89 milles au loch.

5 juin 1991 :
      Enfin, depuis hier, nous avançons bien. D'ici deux jours, nous allons attaquer la remontée sur le Canada.
     J'ai préparé deux planchettes pour ranger les lignes de pêche. En nettoyant les pare-battages pleins de goudron, j'en ai perdu un.
      Tandis que Damien moulait du blé, les cuisinières nous ont mitonné un bon déjeuner : un hachis purée + thon. un régal !!!
      Point : 29°01 N et 45°43 W parcouru 100 milles au loch.

6 juin 1991 :
      A 4h. Aurélie se lève avec moi pour prendre le quart. Elle voit le lever du soleil et me pose un tas de questions sur le système solaire. Elle “m'époustoufle”. Elle me dit que prendre des responsabilités ne lui fait pas peur et qu'elle aime.
      Pendant et après le petit-déjeuner, Alain filme avec le caméscope.
      Tandis que les enfants jouent au légo, je finis le pull pour Mamie Menu et Alain monte des lignes pour la morue.
      Comme tous les jours, nous attendons que le soleil passe derrière les voiles pour qu'un semblant de fraicheur gagne le carré.
      Point : 29°12 N et 47°58 W parcouru 134 milles au loch.

7 juin 1991 :
      Damien a pris son premier quart de 4h à 7h avec Brigitte.

La matinée débute par un événement exceptionnel : la rencontre d'un voilier au milieu de l'Atlantique.    Par vhf, nous apprenons qu'Il s'agit de Vivaldi parti de Sainte Lucie en direction de l'Angleterre. Son skipper est un anglais d'une soixantaine d'années naviguant en solitaire.

      J' en ai profité pour tourner quelques images sur cette rencontre et sur les rélevés du soleil au sextant.
      L'après-midi, nous essayons de nous reposer à l'ombre des voiles. Nous nous douchons à l'eau de mer dans le cockpit tellement nous avons chaud.
      Une nouvelle fois, le vent mollit un peu en virant S-SE.
      Point : 29°54 N et 49°30 W parcouru 100 milles au loch.

8 juin 1991 :
      Nous avons subi quelques calmes cette nuit.
      La matinée est torride. Chacun économise ses forces. Ce sera une journée lecture.
      Sur la route loxodromique, il nous reste 1000 milles à parcourir. Si nous avons hâte de découvrir un nouveau pays, nous regretterons aussi notre bien-être. Notre cocon va se briser en arrivant à terre.
      Point : 31°05 N et 50°42 W parcouru 81 milles au loch.

9 juin 1991 :
      Toujours peu de vent cette nuit. Heureusement, il augmente quelque peu en virant progressivement au SW. Nous devons inverser les voiles.
      Malheureusement, il fait toujours aussi chaud. L'équipage est amorphe. Nous envisageons les projets d'avenir.
      Point : 31°54 N et 52°37 W parcouru 100 milles au loch.